Pasteur David Jang – La parabole du fils prodigue


1. L’essence de l’Évangile contenue dans la parabole du fils prodigue

Le chapitre 15 de l’Évangile selon Luc est largement reconnu comme l’un des passages qui exposent de la manière la plus claire l’essence de l’Évangile. Après la « parabole de la brebis perdue » et la « parabole de la drachme perdue », on trouve la « parabole du fils prodigue », dont le récit, à la fois long et riche, a été interprété et enseigné par d’innombrables théologiens et prédicateurs tout au long de l’histoire de l’Église. Le pasteur David Jang accorde lui aussi une importance particulière à Luc 15, soulignant le cœur évangélique et l’amour de Dieu qui traversent ce chapitre. Notons en particulier que la parabole du fils prodigue est donnée dans le contexte où Jésus veut justifier sa pratique de manger et de recevoir des pécheurs. En effet, face à la question (et même au murmure) des pharisiens et des scribes : « Pourquoi cet homme reçoit-il des pécheurs et mange-t-il avec eux ? », Jésus répond en énonçant trois paraboles successives, révélant ainsi le ‘cœur de Dieu’ et l’‘intention véritable de l’Évangile’ que ses opposants laissaient échapper.

Pharisiens et scribes formaient un groupe religieux d’élite. Ils se considéraient comme « mis à part », observaient scrupuleusement les commandements de la Loi dans la vie quotidienne, recopiaient et enseignaient la Parole ; en apparence, ils semblaient plus pieux et justes que quiconque. Cependant, ils trouvaient étrange le comportement de Jésus : ce dernier n’hésitait pas à « recevoir les pécheurs et manger avec eux ». Pour les pharisiens, c’était de nature à provoquer un rejet total. Eux, qui s’estimaient pieux et fidèles à la Loi, pensaient qu’il fallait éviter tout « contact avec les pécheurs ». Or Jésus adoptait l’attitude contraire : il « accueillait activement les pécheurs, allait au milieu d’eux et partageait leur table ». Choqués, pharisiens et scribes ressentaient non pas une simple critique, mais un ressentiment profond envers Jésus. Dans leur logique, c’était peut-être perçu comme « un blasphème envers la sainteté » ou « un acte brisant toute pureté rituelle ».

Pour répondre à ces murmures, Jésus enchaîne trois paraboles, dont la conclusion se résume à : « Dieu cherche l’unique brebis perdue, et Il se réjouit pour l’unique pécheur qui revient. » La troisième de ces paraboles est précisément celle du « fils prodigue ». Nous avons coutume de l’associer à « la repentance du pécheur et au pardon inconditionnel du Père ». Comme Henri Nouwen l’a magistralement décrit dans son ouvrage Le Retour de l’enfant prodigue (The Return of the Prodigal Son), inspiré par le tableau Le Retour de l’enfant prodigue de Rembrandt, cette parabole suscite une profonde émotion. Les détails, comme les chaussures usées du fils, sa posture à genoux, l’attitude du père attendant le retour de son fils, l’expression jalouse du frère aîné, offrent une représentation saisissante de notre propre intériorité.

Cette parabole offre notamment des scènes qui, en un mot, résument l’essence de l’Évangile. À partir de Luc 15, v. 11, le fils cadet réclame à son père la part de patrimoine qui lui revient. Puis, se rendant dans un pays lointain, il dilapide sa fortune dans une « vie de débauche » et finit par sombrer dans la misère tant matérielle que spirituelle. Il a tellement faim qu’il désire se rassasier des caroubes données aux pourceaux, mais personne ne lui en donne. Dans ce désespoir, il se souvient : « Combien de journaliers chez mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim ! » Il reconnaît alors : « J’ai péché contre le ciel et contre mon père » et prend la décision de rentrer.

La scène la plus émouvante se produit quand le père l’aperçoit de loin et, « ému de compassion, court se jeter à son cou et l’embrasser ». Aussitôt, il ordonne de lui « apporter le plus beau vêtement, de lui mettre un anneau au doigt, des sandales aux pieds et d’aller tuer le veau gras pour faire un festin ». L’Écriture ne mentionne aucune « condition » imposée par le père. On n’évoque même pas en détail la manière dont le fils a gaspillé l’argent ou les péchés qu’il a pu commettre. On constate simplement la joie et l’accueil sans réserve devant le fait qu’il est « revenu ». En revanche, le frère aîné s’y oppose, demandant pourquoi le père se montre si bienveillant envers ce frère. Il proteste : « Voilà tant d’années que je suis à ton service, je n’ai jamais transgressé tes ordres et tu ne m’as jamais donné un chevreau pour festoyer avec mes amis ! » Alors le père répond : « Mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi (Luc 15,31). » Puis il déclare à propos du cadet rentré à la maison : « Car ton frère que voilà était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé. Il fallait bien faire fête et se réjouir. »

Dans son commentaire sur cette parabole, le pasteur David Jang souligne la nécessité de réfléchir en profondeur sur « l’état spirituel de l’être humain », en tenant compte à la fois du fils aîné et du fils cadet. Le fils cadet quitte la maison pour une raison : il entretient une « fausse compréhension de la possession ». Il réclame « la part de biens qui doit me revenir » et considère cela comme « son bien propre ». Le père accède à sa demande, et le fils s’autodétruit par ce choix. Toutefois, quand le fils revient, le père ne se met pas en colère ni n’exécute de jugement. Au contraire, dès qu’il le voit de loin, il court l’étreindre et lui redonne tout ce qu’il a de meilleur.

Ainsi, pharisiens, scribes ou tout croyant expérimenté dans l’Église tombent aisément dans un piège. Ils pensent en effet : « Je suis constamment resté auprès du Père, j’ai été fidèle à la Parole, c’est donc à moi que revient légitimement la bénédiction. » Et ils jugent : « Les pécheurs, qui vivent dans l’iniquité ou la débauche, ne méritent pas l’amour du Père. » Pourtant, l’enseignement que Jésus donne par cette parabole n’est pas que « le pécheur est rejeté », mais au contraire, que « tout pécheur qui revient est accueilli avec joie par le Père », et « celui qui était déjà dans la maison paternelle, s’il ne connaît pas encore le cœur du Père, ne peut savourer la vraie joie ».

Ici se dévoile la nature profonde de l’Évangile. C’est la « bonne nouvelle pour le pécheur », mais qui peut aussi paraître étrangère ou inconfortable aux personnes « religieuses » assurées de leur propre justice. Parce que l’Évangile est conforme à la parole du Seigneur qui déclare : « Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs, à la repentance. » Jésus dit encore : « Il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance. » En rappelant ce paradoxe évangélique, le pasteur David Jang exhorte la communauté chrétienne : qu’elle se reconnaisse parfois dans la situation du fils prodigue, parfois dans celle du frère aîné, et qu’elle se remette en question. Nous ne devons jamais nous endormir sur l’idée que « nous sommes à l’intérieur de la maison, donc tout va bien », car nous pourrions avoir le cœur d’un frère aîné qui, en réalité, ne connaît pas Dieu. D’autre part, si des âmes vagabondent dans le monde, puis reviennent épuisées, l’Église doit continuellement se demander si elle est prête à les accueillir « sans condition » et avec un « sentiment de compassion ».

Par ailleurs, la parabole du fils prodigue a pour toile de fond le chapitre 31 de Jérémie. Dans ce passage, Éphraïm, exilé loin, se lamente : « Ramène-moi, et je reviendrai, car tu es l’Éternel, mon Dieu. » Et Dieu déclare : « Éphraïm est-il pour moi un fils chéri, un enfant auquel je prends plaisir ? Car plus je parle contre lui, plus son souvenir est en moi. Aussi mes entrailles sont émues pour lui : j’aurai pitié de lui, dit l’Éternel. » Ce qui est annoncé en Jérémie 31 s’accorde exactement avec l’attitude du père envers son fils, telle que décrite en Luc 15. Ainsi, la Bible, de l’Ancien au Nouveau Testament, proclame de manière constante « l’amour de Dieu, sa compassion pour le pécheur et la joie suscitée par le retour de ce dernier ». Cela forme la racine et le cœur même de l’Évangile.

Même au temps de Jésus, et en particulier chez ceux qui se revendiquaient comme « le peuple de Dieu » (pharisiens, scribes), on passait à côté de l’essence de cet amour et de cette joie. Ils se demandaient avec hostilité : « Comment le Dieu saint peut-Il manger avec les pécheurs et les accueillir ? » Mais en réalité, la « Bonne Nouvelle » est précisément que « Dieu dépasse toutes les lois et conceptions humaines, Il se présente comme un Père qui attend le retour du pécheur ». Si l’Église veut faire l’expérience profonde de cet Évangile, elle doit apprendre « le cœur du Père ». Or ce cœur consiste à « accueillir sans condition » celui qui revient d’un pays lointain, et à reconnaître que « même celui qui est depuis toujours auprès du Père ne connaîtra pas la vraie joie s’il n’a pas compris la volonté de son Père ».

Quand le pasteur David Jang parle de « repentance et de pardon », il se réfère souvent à cette parabole. Quand le fils prodigue revient, il confesse : « J’ai péché contre le ciel et envers toi, mon père. » Il a compris que « dès l’origine, lui et son père ne faisaient qu’un, et qu’il n’y a pas de vraie vie en dehors de la maison paternelle ». Comme Jésus le dit en Jean 14,20 : « En ce jour-là, vous saurez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous », l’être humain ne peut pas, par essence, se séparer de Dieu. Mais nous prenons parfois le chemin de l’éloignement, confondant liberté et convoitise matérielle ou propriété. L’image du fils prodigue en est le parfait archétype. Pourtant, la vraie liberté s’épanouit « en communion avec le Père », et le véritable amour naît « d’un choix fondé sur la liberté totale ».

C’est pourquoi le retour du fils prodigue est plus qu’une simple leçon de morale. C’est un « retour ontologique » qui démontre que l’homme ne saurait mener une vie épanouie loin de Dieu. Quand nous nous repentons, le Père court nous serrer contre lui, sans aucune condition. Voilà la vérité qui se révèle. L’Église doit constamment garder à l’esprit ce message fondamental de l’Évangile, qui touche le cœur des hommes. Quand nous prêchons l’Évangile, nous n’exprimons pas autre chose que cette « hospitalité inconditionnelle » et cet « amour débordant du Père » que décrit la parabole.

Le point crucial, c’est aussi l’attitude du frère aîné. Il demande : « Pourquoi fais-tu un tel festin pour mon cadet ? Moi, je ne t’ai jamais désobéi et pourtant tu ne m’as jamais donné un chevreau pour festoyer avec mes amis ! » Le père rétorque : « Mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi. » Ce qui montre que le frère aîné, sur le plan intérieur, était déjà parti loin de son père. Il croyait mériter quelque chose en échange du fait d’être « resté dans la maison paternelle », sans voir qu’au fond « j’appartiens à mon père et mon père m’appartient, et tout nous est commun depuis le départ ». À cet égard, on retrouve, de nos jours encore, la même attitude chez ceux qui s’imaginent avoir passé beaucoup de temps dans l’Église, avoir rendu beaucoup de services ou avoir pratiqué fidèlement. Ils peuvent se dire : « Je donne tant de moi-même, alors pourquoi reçoit-il un accueil si chaleureux ? Et pourquoi ne me met-on pas en honneur, moi ? » Or le Père répond : « Ton regard est déformé : en vérité, tout ce qui est à moi est déjà à toi, et nous ne faisons qu’un. » En réalité, il n’y a pas de plus grande bénédiction, mais par ignorance, le frère s’enferme dans la colère et le sentiment d’exclusion.

Cette parabole expose chez les deux fils « la nature pécheresse de l’homme, son aveuglement spirituel et son incapacité à connaître le cœur du Père ». Que ce soit le cadet ou l’aîné, tous deux symbolisent la limite humaine. Mais le père, en retour, leur offre un amour inconditionnel, la possession de tous ses biens et un festin. Retrouver ce qui était perdu procure une joie immense, et faire revivre ce qui était mort nourrit une grande reconnaissance. Telle est la réponse de Jésus et la justification de son attitude : « manger avec les pécheurs ». Les pharisiens et les scribes, prisonniers de leurs prescriptions légales et rituelles, condamnaient le geste de Jésus, tandis que celui-ci, au contraire, accomplissait la volonté évangélique de « chercher et sauver ce qui était perdu ».

Ainsi, la parabole du fils prodigue illustre, d’une part, l’amour inconditionnel envers le pécheur ou l’égaré, et, d’autre part, l’appel adressé à ceux qui sont déjà « à l’intérieur », afin qu’ils réalisent qu’ils passeront à côté de la joie authentique s’ils ne connaissent pas le cœur du Père. Le pasteur David Jang répète que la communauté d’Église doit préserver simultanément ces deux dimensions : garder des portes ouvertes pour quiconque revient de « terres lointaines », et encourager ceux qui sont déjà là à s’interroger : « Connais-je vraiment le cœur du Père ? Est-ce que je goûte la joie d’être un avec Lui ? » Si l’un de ces deux volets venait à être négligé, l’Évangile risquerait d’être dénaturé et l’essence même de la communauté ébranlée.

Un aspect notable est que, dans la parabole, le fils prodigue, en confessant : « J’ai péché contre le ciel et envers toi », ne dresse pas la liste détaillée de ses fautes. La racine de la séparation entre l’homme et Dieu ne réside pas tant dans la « matière » elle-même que dans la « convoitise et l’interprétation erronée de la possession », comme le montre clairement ce récit. Le cadet pense trouver la liberté en s’émancipant, mais en rompant la relation paternelle, il se trompe de chemin. Il réclame sa part, part pour un pays lointain, et vit dans la débauche. Voilà le fond du péché. Le péché, c’est « croire à tort que nous pouvons jouir du bien sans Dieu », ou « ignorer que ce qui appartient au Père nous était déjà donné, et partir en prétendant que c’est notre seul bien ».

Cependant, le fils finit par affronter le dénuement le plus radical. Et sa prise de conscience est la suivante : « Loin de la maison de mon Père, je ne peux pas subsister. » Lorsqu’il confesse ce fait, nous appelons cela « repentance » ; et quand le père court se jeter à son cou, nous parlons de « pardon ». Pour le pasteur David Jang, ces deux termes, « repentance et pardon », ne doivent pas rester des concepts religieux figés, mais toucher profondément notre vie. C’est la « restauration de notre relation avec le Père », qui nous fait passer de la misère de la mangeoire des porcs à la fête somptueuse du veau gras.

Cette parabole du fils prodigue oriente non seulement sur le ministère terrestre de Jésus, mais aussi sur le plan du salut déployé par Dieu depuis l’Ancien Testament et constitue un guide pour notre époque ecclésiale. Chacun de nous, à un moment ou un autre, peut se comporter comme le prodigue, ou bien comme le frère aîné. L’essentiel est de revenir au Père, en prenant conscience de notre appartenance véritable et de Celui qui nous attend depuis toujours. C’est là le cœur de Luc 15 et le message essentiel que l’Église doit méditer et diffuser.

Finalement, la parabole se conclut par cette parole du père : « Ton frère est revenu ; il était mort et il est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé ; il fallait bien faire la fête et se réjouir. » Il ne s’agit pas d’un commandement ou d’une doctrine pesante, mais de la « réaction naturelle de l’hospitalité ». Quand on retrouve quelqu’un qu’on aime, on l’accueille avec joie, on festoie avec lui. Hélas, à cause de notre nature pécheresse ou de notre égoïsme, cette réaction naturelle devient parfois difficile. Comme le frère aîné, nous pouvons nous dire : « Et moi, pourquoi ne m’honore-t-on pas ? » Dans ces moments, il faut se demander à soi-même : « Ai-je oublié que je suis déjà avec le Père et qu’il m’a tout donné ? » Car si nous sommes déjà auprès de Lui, tout est à nous. Quand nous retrouvons cette grande vérité, jaillit en nous une joie et une liberté indicibles.

Le pasteur David Jang insiste sur le fait que l’Église doit constamment se réformer à la lumière de cette parabole. La communauté ecclésiale est appelée à accueillir les « fils prodigues » qui reviennent, mais aussi à offrir à « ceux qui sont comme le frère aîné » une opportunité de meilleure compréhension du Père. Car la fidélité religieuse ou le service ne garantissent pas la connaissance du cœur de Dieu. La véritable maturité spirituelle se manifeste quand on prend conscience que « le Père et moi, nous ne faisons qu’un, et tout nous est déjà commun », et qu’on agit en conséquence avec un esprit de joie et d’hospitalité. Quand un grand nombre de croyants aspirent à ressembler ainsi au Père, sans calcul ni condition, l’Église devient un lieu où le Royaume de Dieu est palpable parmi les hommes.

Le succès durable du livre d’Henri Nouwen, Le Retour de l’enfant prodigue, s’explique aussi par cette profondeur. L’auteur médite le tableau de Rembrandt, observe la posture du fils misérable à genoux, la main du père posée sur son dos, et le frère qui se tient à distance, l’œil empli de jalousie. Le tableau offre une mise en scène saisissante de la parabole. C’est un reflet de la condition psychologique et spirituelle de chacun. Tous, un jour, nous avons été le fils prodigue, et tous, un autre jour, nous avons été le frère aîné. Mais l’invitation finale est de « choisir la voie du Père ». Voilà ce qui donne à la parabole sa force d’exhortation intérieure.

Quand Jésus a prononcé la parabole du fils prodigue, il ne s’agissait pas seulement de réduire au silence la récrimination des pharisiens ; il voulait qu’ils redécouvrent « ce que Dieu désire vraiment ». Bien sûr, les pharisiens menaient une vie pieuse, enseignaient la Parole, respectaient la pureté rituelle. Pourtant, ils ignoraient l’amour du Dieu compatissant, Celui qui accueille avec miséricorde. Même lorsque Jésus annonçait qu’il y a une grande joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent, cela paraissait étrange à leurs oreilles. Ils se demandaient : « Nous qui avons construit toute cette piété et cette justice, est-ce que cela ne veut plus rien dire ? Comment accueillir ainsi le pécheur ? » Mais Jésus voulait précisément leur faire connaître « la miséricorde inconditionnelle du Père ». Et la parabole du fils prodigue produisait un choc destiné à ébranler leurs certitudes.

Si l’on pratique la foi durant de longues années, on peut, à son insu, se rigidifier dans l’attitude du frère aîné. « Je viens à l’église, je donne l’offrande, je sers, je connais la Parole », cet état d’esprit peut conduire à mépriser inconsciemment ceux qui débarquent tout juste, voire à les accueillir avec réticence. Dans ce cas, le Père nous rappelle inlassablement : « Mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi. Mais ton frère est revenu à la vie, pourquoi ne nous réjouirions-nous pas ? » Si nous n’entendons pas cette parole dans notre cœur, nous sombrerons comme le frère dans un piège de justice personnelle, tout en restant privés de la véritable bénédiction paternelle.

Ainsi, l’Église doit se réjouir plus que tout autre chose lorsque le prodigue rentre, et dans le même temps, inviter ceux qui y sont déjà à se demander : « Est-ce que je jouis vraiment de la communion quotidienne avec le Père, ou bien ai-je une mauvaise compréhension de Son cœur ? » Voilà l’intention de Jésus et la manière dont l’Évangile agit concrètement. Quand on dit que « le seuil de l’Église doit être bas », ce n’est pas seulement une question d’indulgence ou d’éthique chrétienne ; c’est une imitation du « cœur du Père » qui accueille sans condition ceux qui rentrent.

Le ressentiment éprouvé par les pharisiens est quelque part le reflet de l’exigence de « justice » et du refus de « l’injustice » ancré dans la nature humaine. On peut se dire : « Si le pécheur est pardonné trop facilement, où est la justice ? » Or la conclusion de la parabole nous surprend : « C’est là le sens même de la justice du Royaume de Dieu. » En effet, dans le Royaume, on ne ménage pas le salut du pécheur repentant, on fête son retour. Le Père embrasse et rend la dignité à son fils revenu, en dépit de tout ce qu’il a gâché. Si on évalue cela sur un plan purement humain, c’est une injustice choquante. Pourtant, c’est précisément la justice de Dieu, car la justice divine opère non par « mérite », mais par « grâce ».

Ici, nous évoquons la déclaration de Paul dans l’Épître aux Romains : « Il n’y a point de juste, pas même un seul. » Tous se sont égarés loin de Dieu et ne sont sauvés que par Sa grâce et Sa miséricorde. Or cette grâce est requise de la même manière pour le prodigue débauché que pour le frère aîné qui se croit juste en restant à la maison. Ainsi surgit le « miracle du pardon et de la repentance ». Chacun doit revenir, chacun doit (re)connaître le cœur du Père. Et ce processus inclut la joie du « festin du veau gras », expression de l’allégresse de Dieu.

La parabole nous livre deux grands enseignements. Le premier est qu’« il suffit au pécheur de revenir », car Dieu répond aussitôt à ce petit pas par Son accueil inconditionnel. Le second est qu’« être dans la maison du Père » ne suffit pas si l’on ignore encore Son cœur ; la véritable joie n’est accordée qu’à ceux qui le comprennent. Négliger l’une de ces deux vérités nous écarte de la joie complète de l’Évangile.

Le pasteur David Jang applique souvent ce message à la réalité de l’Église en Corée. Il observe que la plupart des disputes ou conflits au sein de l’Église surgissent d’un attachement à « ce qui est à moi », un état d’esprit analogue à celui du fils prodigue réclamant : « Donne-moi ma part du patrimoine. » Bien souvent, les divisions, dans l’Église, naissent justement de ce genre de revendication. Pour y remédier, il faut se souvenir que le Père dit : « Tout ce qui est à moi est à toi. » Dès le départ, nous sommes appelés à tout partager et à vivre dans la communion. Si nous ne prenons pas garde, nous risquons de nous appauvrir spirituellement ou matériellement, comme le cadet, ou de tomber dans l’illusion de la justice personnelle, comme l’aîné. Les deux situations sont tout autant destructrices.

Quand des questions de possession surgissent, nous devrions nous poser la question : « Le Père ne m’a-t-Il pas déjà tout donné ? Que suis-je en train de revendiquer ? » Le vrai disciple, à l’image de la confession de Paul – « ne rien avoir et pourtant posséder toutes choses » – est celui qui sait se tenir les mains ouvertes et recevoir la grâce de Dieu. Dans une communauté où chacun revendique son droit et sa part, on reproduit l’erreur du fils prodigue ou du frère aîné, chacun de son côté. La parabole nous invite donc à recouvrer le cœur du Père, et nous incite à mettre l’accent sur la grâce plutôt que sur la possession.

Dans la continuité du chapitre 15, Luc 16 nous présente aussitôt « la parabole du gérant malhonnête », qui enseigne la gestion spirituelle des biens. À l’origine, il n’y avait pas de subdivision par chapitres, si bien que ces deux paraboles se suivent. Après l’exemple du fils prodigue, illustrant les conséquences d’une mauvaise compréhension de la possession, on a celui du gérant malhonnête, qui montre comment agir avec sagesse vis-à-vis des richesses. Jésus vient d’exposer, à travers l’histoire du prodigue, comment le désir de posséder nous coupe du Père et nous perd. Il enchaîne sur : « Si un jour vous devenez riches, comment vivrez-vous ? » et souligne l’importance de la « conscience d’être simple gérant » de biens qui appartiennent en dernier ressort à Dieu. Le pasteur David Jang met en relation ces deux paraboles pour dire que plus l’Église s’enrichit, plus elle doit se méfier du danger de la convoitise et de la discorde. Si l’on conserve l’« esprit de gérance », on peut étendre davantage le Royaume de Dieu ; dans le cas contraire, la tentation de « défendre sa part » peut rapidement conduire à des divisions dans la communauté.

C’est ainsi que Luc 15 et 16 délivrent un même message de manière complémentaire. La parabole du fils prodigue nous rappelle : « Le Fils de Dieu s’est entièrement donné à nous, et le Père aussi nous pardonne, accueillant sans réserver quiconque revient. » La parabole du gérant malhonnête poursuit en disant : « Comment devons-nous vivre si nous sommes riches ? Agissez avec l’habileté spirituelle pour bâtir un trésor dans les cieux. » Dans l’histoire du fils prodigue, Jésus montre que s’attacher à nos biens nous éloigne du Père ; dans celle du gérant, Il exhorte à user de la richesse avec l’intelligence du Royaume. Ainsi, le pasteur David Jang avertit que, dans les Églises, plus les moyens et les effectifs grandissent, plus la convoitise et les querelles de possession risquent de se multiplier si l’on perd de vue la « mentalité de gérance ». En revanche, si l’on reste conscient que « tout vient de Dieu » et qu’on l’emploie pour Son Royaume, la communauté en sera fortifiée.

En définitive, Luc 15 et 16 nous offrent un regard cohérent. La parabole du fils prodigue fait entendre que « Dieu a tout donné et pardonne celui qui revient », tandis que la parabole du gérant malhonnête appelle à la sagesse dans l’usage de l’argent et des biens de ce monde. Jésus enseigne : « Faites-vous des amis avec les richesses injustes, afin qu’ils vous reçoivent dans les tabernacles éternels. » Ces propos font écho à la leçon du fils prodigue : « Puisque tout appartient au Père, c’est dans la reconnaissance et le partage que vous devez employer ces biens. »

La parabole du fils prodigue embrasse ainsi tous les aspects de la vie chrétienne : la conversion personnelle, l’accueil inconditionnel dans la communauté, et l’alliance restaurée entre Dieu et l’homme. Le pasteur David Jang l’appelle souvent « l’histoire de deux fils » et rappelle qu’il existe, dans l’Église, des personnes au tempérament « prodigue », d’autres au tempérament « aîné ». Dans la réalité quotidienne, parfois nous sommes tentés par un péché qui nous éloigne ; parfois nous nous érigeons en justes, comptant sur nos œuvres et ressentant de la jalousie. Mais au bout du compte, le Père rétablit l’unité. C’est là la vision du « Royaume de Dieu » et la mission que l’Église doit incarner.

La scène du retour du fils prodigue nous touche tant parce qu’elle met en lumière la « compassion » du père. Selon la logique du monde, le cadet n’est qu’un fils indigne ayant dilapidé la fortune familiale. Le père devrait se montrer froid ou distant. Mais, tout au contraire, il court à la rencontre de son enfant, l’embrasse, donne ordre de lui revêtir la plus belle robe, de lui passer un anneau, de lui chausser les pieds, et de tuer le veau gras pour célébrer. Le fils n’a même pas le temps de demander : « Traite-moi comme l’un de tes serviteurs. » La fête est déjà lancée. Voilà l’« exubérante joie » et la « grâce qui dépasse toute mesure » qu’apporte l’Évangile.

C’est précisément l’attitude qui heurtait les pharisiens : « Comment pardonner si aisément un pécheur ? » Et il est vrai que même des chrétiens de longue date peuvent se sentir déconcertés. « Comment quelqu’un sans aucun mérite peut-il à ce point devenir le centre de la fête ? » Mais voici le paradoxe de la Bonne Nouvelle : « Il y a plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance. » Cela va à l’encontre de tout esprit méritocratique. Notre rôle à nous est seulement d’« accueillir cette grâce et de nous en réjouir ». C’est pourquoi le père déclare : « Il fallait bien faire fête et se réjouir ! »

En parallèle, le père s’adresse au frère aîné en l’appelant affectueusement « mon enfant », lui rappelant tout l’amour qu’il lui porte : « Tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi. » C’est son diagnostic envers l’aîné : « Tu demeures déjà dans l’abondance. Pourquoi demeures-tu pourtant dans la frustration ? » Et cette parole se répercute sur « ma » condition spirituelle. Certains d’entre nous vivent dans l’Église depuis longtemps et se demandent : « Pourquoi n’y a-t-il pas de fête pour moi ? » Peut-être avons-nous oublié la joie permanente d’être auprès du Père, chaque jour. Nous devrions vivre chaque instant comme un festin, mais nous laissons place au ressentiment et à la jalousie envers ceux qui arrivent.

Ainsi, la parabole du fils prodigue propose les deux pôles inséparables de la foi : la « repentance » et le « pardon ». La repentance du fils cadet, et le pardon inconditionnel du père qui aboutit à la fête. Le père réserve le même amour au fils aîné, concluant avec lui en beauté. Cette totalité répond à l’interrogation initiale lancée par les pharisiens et les scribes au verset 2 de Luc 15 : « Pourquoi Jésus accueille-t-il et mange-t-il avec les pécheurs ? » La réponse définitive est donnée au verset 32 : « Car ton frère est revenu à la vie, il était perdu et il est retrouvé ; il fallait bien faire la fête et se réjouir. »

Ce message vaut aussi pour les défis actuels de l’Église. Pour quiconque se repent et revient, l’Église doit manifester un accueil sans limite. En même temps, ceux qui sont déjà dans l’Église doivent sans cesse se rappeler « l’immensité de la grâce reçue ». Voilà la double exhortation qui résonne. Chacun, dans son propre cheminement, peut être tantôt le fils cadet, tantôt le frère aîné, mais, in fine, nous sommes conviés à partager « le cœur du Père ». Le pasteur David Jang y voit le signe d’« une Église vraiment mûre » : une communauté où « l’enfant prodigue reçoit le pardon » et où « le frère aîné se réjouit de ce pardon ». C’est l’image même du ciel.

Quand un « fils égaré » revient ou quand ceux qui sont « à l’intérieur » affichent une pseudo-justice excluante, la responsabilité de l’Église est de rappeler « le cœur du Père ». Un cœur qui n’a rien de spectaculaire, si ce n’est la « compassion qui surgit quand le fils est encore loin » et la « bienveillance qui accueille le retour ». Telle est la réponse donnée aux pharisiens et scribes par Jésus. De plus, la parabole reflète la diversité des expériences humaines (on peut être tantôt le cadet, tantôt l’aîné) et montre que le Père embrasse tout le monde dans Sa large bonté.

La « repentance et le pardon » ne sont pas ici de simples obligations religieuses ou des préceptes moraux. Ils signifient le « rétablissement de l’unité originelle avec Dieu », la participation renouvelée à Sa plénitude. Le fils avait beau être dans un pays lointain, le père ne l’oubliait pas. Dès le moindre signe de retournement, il se précipite pour l’étreindre. Il en va de même pour le frère. Le père sait pourquoi il est en colère. Il lui rappelle que « tout lui appartenait déjà ». Une fois cette vérité comprise, les conflits et les malentendus s’apaiseront dans l’Église. On délaissera la revendication de « mes droits » pour s’émerveiller de la fraternité avec le Père dont nous jouissons tous. Alors la vision du festin décrit par la parabole pourra se réaliser dans la vie de tous les jours.

Ainsi, Luc 15 et la parabole du fils prodigue redonnent à l’Évangile sa dimension radicale et surprenante. Les pharisiens et scribes, « ceux dont le cœur est fermé », pouvaient juger ce récit extrême, mais l’Évangile porte une grâce plus grande encore. Comme Jésus a tout donné sur la croix, jusqu’à ses derniers vêtements tirés au sort par les soldats, Dieu nous a tout donné. C’est le prolongement de la parole du père : « Tout ce qui est à moi est à toi. » Qui l’accueille ne restera pas dans la « porcherie » de la détresse, mais entrera dans la plénitude de la maison paternelle. On sortira aussi de la tentation du frère aîné, qui consiste à troquer l’amour du Père contre ses propres efforts. Au contraire, nous vivrons dans la joie de la grâce déjà donnée. C’est là la force de l’Évangile et l’espérance de l’Église.

Le pasteur David Jang met en avant ce verset pour souligner : « L’homme tombe dans le péché s’il ignore la liberté que Dieu lui a donnée, mais c’est justement cette liberté qui lui permet à tout moment de revenir. » Dieu ne nous a pas créés comme des robots prédestinés à Lui obéir. Il veut que nous L’aimions librement. Dans la parabole, le fils prodigue a abusé de cette liberté, mais il a pu se remettre en marche pour revenir. Et le père l’a accueilli immédiatement, avec joie. Il en va de même pour le frère aîné : « Va-t-il entrer et se réjouir avec son frère, ou bien demeurer dehors, envahi par la rancune ? » C’est son choix. Dieu veut que, de façon libre, tous les hommes entrent dans le « véritable amour ». Et cet amour s’accomplit dans la « joie de voir ce qui était perdu être retrouvé » et dans la « célébration de ce qui était mort et qui revit ».

Au plan pastoral, la leçon est limpide : « Accueillez sans restriction celui qui revient, et que ceux qui sont déjà dans l’Église apprennent à connaître le cœur du Père. » Voilà le modèle que Jésus démontre en Luc 15. Manger avec les pécheurs pour les conduire à la repentance et au salut, et enseigner à ceux que cela scandalise : « C’est cela la joie du Royaume de Dieu. » Une véritable communauté doit inclure aussi bien le cadet que l’aîné, tout en gardant « le Père » au centre.

Le mot de la fin, on l’entend simultanément de la bouche de Jésus et du Père : « Ce frère que voilà était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé ; c’est pourquoi il fallait faire une fête et se réjouir. » Puis le Père rappelle au frère : « Tout ce qui est à moi est à toi. » L’Église est appelée à embrasser cette attitude : « Réjouis-toi du retour de ton frère ! Souviens-toi que tu étais déjà comblé auprès du Père. Ensemble, réconciliez-vous et unissez-vous dans la joie du festin. » Dans un monde de divisions, de compétitions et de rivalités, Luc 15 indique comment l’Église peut offrir un signe du Royaume de Dieu, fondé sur une hospitalité radicale et la joie commune. Telle est la « face de Dieu » que le pasteur David Jang présente comme le centre de l’Évangile.


2. « Possession » et « unité » spirituelle à la lumière de la parabole du fils prodigue

La parabole du fils prodigue s’articule autour du problème de la « possession ». Le fils cadet exige : « Père, donne-moi la part de biens qui doit me revenir. » Et en Luc 15,31, le père déclare au fils aîné : « Tout ce que j’ai est à toi. » Si l’on médite cette déclaration, on réalise que la cause profonde de la séparation entre l’homme et Dieu se trouve dans notre « mauvaise compréhension de la possession » et notre « interprétation faussée de la liberté ou des biens matériels ». Lorsque nous cherchons à nous approprier les choses (« c’est à moi »), nous basculons souvent vers la pauvreté, l’errance et la rupture avec la communauté.

Le pasteur David Jang insiste là-dessus pour alerter l’Église sur la gestion de ses « possessions ». Les églises peuvent croître en finances, en personnels ou en immobilier, mais cet enrichissement peut devenir un foyer de conflits si l’on n’y prend garde. Le pasteur Jang prévient : « Plus l’Église est prospère, plus elle risque de reproduire la faute du fils prodigue, qui a fait un mauvais usage de sa richesse. » C’est pourquoi elle doit absolument entretenir une « conscience de gérance ». Si nous oublions que « tout appartient au Père, et que ce que le Père a est à nous », alors le scénario du « Donne-moi ma part » peut se répéter sous forme de crise individuelle ou collective. Pour prévenir ce danger, il est essentiel que tous, dans l’Église, rappellent inlassablement qu’« en demeurant dans la maison du Père, nous partageons déjà tout ».

Comme le montre la parabole, l’homme cherche parfois à « vivre librement » en se libérant de l’autorité paternelle, mais ce « chemin de soi-disant liberté » débouche sur la mangeoire à cochons. Ce paradoxe s’observe aussi dans notre société capitaliste. Quand chacun veut maximiser son profit, s’accaparer ses propres biens, on aboutit à une société éclatée et à un sentiment de vide spirituel. L’Église n’échappe pas à ce phénomène. Dès qu’on adopte l’attitude « c’est mon Église, mon bien, ma part », on s’éloigne de la plénitude que propose la « maison du Père », laquelle suppose d’« être ensemble ».

Le frère aîné en illustre la version inverse. Il ne quitte pas la maison et ne gaspille pas de richesse, mais il souffre d’une forme de misère intérieure. Il gémit : « Tu ne m’as jamais donné un chevreau pour faire la fête. » Le père répond : « Tout ce qui est à moi est à toi. » Autrement dit, entre le père et ses enfants, il n’y a pas de séparation. Or le regard déformé de l’aîné l’empêche de s’en rendre compte. Il veut distinguer : « Ce qui est au père est au père, ce qui est à moi est à moi. » Ou il affirme : « J’ai obéi tant d’années, j’ai donc droit à un certain bénéfice. » Une telle mentalité provoque la souffrance aussi bien chez le cadet que chez l’aîné.

Le père, lui, révèle l’ordre originel : « Tout ce qui est à moi est à toi, et tu es toujours avec moi ; en vérité, tu avais déjà droit à tout. » Ce principe recoupe la déclaration de la Bible : « Dieu a tout donné à l’homme dès la création, en le faisant à Son image et en l’appelant à gouverner la terre et les mers. Dans le Christ, Dieu nous a aussi autorisés à partager Sa vie, Sa sagesse, Sa gloire. » Pourtant, l’homme veut « s’approprier ce qui est à lui », ce qui le sépare de Dieu. Au lieu de tout posséder en restant auprès du Père, il préfère en obtenir « un peu tout de suite », sombrant dans la pauvreté et l’isolement.

C’est valable pour l’Église comme pour chaque croyant. « Seigneur, j’ai beaucoup servi, j’ai beaucoup donné, Tu me dois bien une bénédiction », cette logique du mérite nous rend semblables au frère aîné. Ou bien « je ne veux pas que Dieu me dicte ma vie, je veux la liberté », cette logique nous rend semblables au fils prodigue. Dans les deux cas, la parabole montre leur erreur : coupés de Dieu, on ne peut rien posséder ni jouir vraiment. L’objectif est de « demeurer avec le Père », d’expérimenter la joie et la liberté contenues dans Son affirmation : « Tout ce qui est à moi est à toi. » Sans cette prise de conscience, il viendra un jour où l’on se retrouvera dans la même faillite que le cadet ou la même colère que l’aîné.

La parabole propose un remède : « Revenir à l’unité avec le Père. » Ce peut être à travers le chemin d’humilité du fils cadet, qui confesse son péché, ou à travers la révélation faite au fils aîné, qui clarifie enfin le cœur du Père. L’important, c’est « revenir dans la maison paternelle ». Là se produisent la « repentance » et le « pardon » ; se transforme aussi notre vision de la « possession ». On passe de « ce que je me suis approprié par mes efforts » à « ce que le Père m’a accordé et que je partage avec mes frères et sœurs ». Quand cette transformation de la pensée opère, l’Église devient plus unie et plus riche spirituellement, capable de manifester l’hospitalité et l’amour envers le monde.

Le pasteur David Jang compare cela à un héritage familial. Sans un esprit sain, la richesse transmise finit par corrompre, même après trois générations. Il n’y a pas que le monde séculier qui connaisse ce phénomène ; l’Église aussi peut en faire l’expérience. Après une période de croissance en ressources et en nombre, si l’on se dit : « Je ne suis pas un fils prodigue, je ne suis pas un frère aîné », on risque d’être pris au piège. Jésus a dit : « Il est difficile à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu », non parce que la richesse est en soi mauvaise, mais parce que la cupidité et l’orgueil que nous inspire l’argent nourrissent le péché. Nous devons tirer de cette parabole la leçon suivante : « Suis-je vraiment un fidèle gérant ? Suis-je conscient que le Père vit en moi et m’a déjà tout donné ? » Il s’agit d’un examen personnel permanent.

En outre, la spiritualité de la « repentance et du pardon » transforme notre regard mutuel. Quand un pécheur revient à l’Église après avoir commis d’évidentes fautes, au lieu de le juger, nous devons dire : « Puisqu’il revient, réjouissons-nous et faisons un festin ! » Cela ne veut pas dire qu’on banalise la faute, mais qu’on célèbre « la grâce du Père qui couvre et relève le pécheur repentant ». Si, au contraire, on se contente de l’accabler : « Tu as commis tel péché, supporte-en les conséquences », on adopte l’attitude du frère aîné. Jésus déclare pourtant : « Il y a une joie plus grande encore pour un pécheur repentant que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance. » Pour être fidèle à l’Évangile, l’Église doit manifester cette largesse d’accueil.

De plus, le « frère aîné » a lui aussi besoin de se repentir. Nul n’est à l’abri de croire, sous prétexte de pratique religieuse, qu’il connaît la volonté de Dieu, alors qu’en réalité il ne saisit pas l’amour du Père. Un tel croyant peut nourrir une jalousie refoulée, semblable à celle du frère aîné. L’Église se doit donc de prendre soin de ce type de personnes, afin qu’elles entendent : « Mon enfant, tu es toujours avec moi ; tout ce que j’ai est à toi », et qu’elles sortent de leur incompréhension. Ainsi se réalise la plénitude de l’« unité ».

Tout cela est possible parce que Dieu nous a déjà tout offert. L’événement suprême en est la Croix du Christ. Les soldats se sont même partagé la tunique de Jésus, image forte de Celui qui s’est donné entièrement. Ainsi, la phrase du père dans la parabole – « Tout ce qui est à moi est à toi » – atteint son plein accomplissement dans le sacrifice du Fils. Si nous y croyons, nous n’avons plus lieu de marquer « ça c’est à moi, ça c’est à toi » et de nous chamailler. Celui qui possède davantage peut donner davantage, celui qui a moins reçoit avec reconnaissance. Ensemble, nous pouvons festoyer dans la maison du Père.

Le pasteur David Jang appelle cela « l’économie que doit viser la communauté de l’Église ». Le monde se fonde sur la concurrence, la monopolisation ou l’exclusion, mais l’Église est appelée à un autre principe : « accueillir les prodigues, ressusciter ceux qui se croient justes, et jouir ensemble de la fête paternelle ». Le Psaume 133 chante déjà : « Qu’il est bon, qu’il est doux pour des frères de demeurer ensemble ! » Dans Actes 2, l’Église primitive mettait en commun ses biens et pourvoyait à tous les besoins. On retrouve cette même logique de « révolution spirituelle », qui prend naissance dans « le cœur du Père ».

La théologie de la possession et de l’unité, à la lumière du fils prodigue, tient en quelques points-clés. Premièrement, nous devons garder à l’esprit que « rester dans la maison du Père » nous permet de tout posséder. Deuxièmement, en nous accrochant à « notre part », nous nous éloignons de Dieu et, parfois, nous tombons dans la détresse. Troisièmement, si nous nous repentons et revenons, le Père nous accueille sans condition et se réjouit de nous avoir « retrouvés ». Quatrièmement, même ceux qui sont dans l’Église, s’ils ignorent le cœur du Père, restent dans la colère ou la tristesse ; ils ont donc aussi besoin d’une repentance véritable. Cinquièmement, en comprenant tout cela, nous réalisons que « tout est à Dieu, et ce qu’Il nous donne n’est pas un bien strictement personnel, mais destiné au partage dans la communauté ».

Appliquer cela à la vie concrète de l’Église signifie qu’au lieu de se dire « c’est mon bien », nous devons adopter une attitude de confiance : « Profitons ensemble de ce que Dieu nous offre. » À défaut, les querelles surgissent dès qu’on se sent lésé. Mais le fils prodigue nous montre que « la maison du Père regorge de biens au point de pouvoir organiser une nouvelle fête dès qu’un enfant revient ». Si nous ne perdons pas cette conviction de l’abondance, nous privilégierons le partage à la dispute, et nous vivrons une joie bien plus grande.

Le pasteur David Jang affirme : « La véritable liberté s’accomplit seulement en Dieu. » Le fils prodigue a cru gagner la liberté en échappant au regard du Père, mais ce n’était que licence, conduisant finalement à l’esclavage. Tandis qu’en retournant au Père, il a reçu la vraie liberté et un festin. De même, Jésus dit en Jean 8,36 : « Si donc le Fils vous affranchit, vous serez réellement libres. » La liberté ne consiste pas à faire ce que nous voulons, mais à « vivre dans l’unité avec Dieu, participant à Son abondance et Son dessein originel ». L’Église doit conduire chaque croyant vers cette liberté, qui commence avec la « repentance » et s’achève dans le « pardon inconditionnel ». Ainsi, chacun – frère aîné ou fils prodigue – aura la possibilité de renaître à l’amour du Père. Cette ouverture universelle est la force de l’Évangile.

La parabole nous touche tant parce qu’elle est « notre histoire ». À un moment, nous pouvons agir comme le cadet, gaspillant nos ressources et quittant Dieu ; à un autre, nous pouvons ressembler à l’aîné, nous glorifiant de nos mérites et enviant ceux qui reçoivent un accueil joyeux. Dans les deux cas, le problème fondamental est la « séparation d’avec le Père ». Une fois que nous le saisissons, le chemin de la repentance est possible, et la grâce du pardon surgit. Par là, même notre rapport à la « possession » change : nous comprenons enfin que « tout est au Père » et que nous en sommes les bénéficiaires en commun. Dès lors, nous vivons dans une joyeuse liberté, non pas sous le régime du « je ne possède rien », mais sous celui du « je possède tout en Dieu ». C’est l’énigme dont parle Paul : « être pauvre, et pourtant enrichir plusieurs ».

Tel est le mystère de l’Évangile que Luc 15 rend manifeste, un Évangile auquel l’Église est appelée à se conformer. Les pharisiens et les scribes demandaient : « Pourquoi Jésus mange-t-il avec les pécheurs ? » La réponse est : « Parce que Dieu est un Père qui se réjouit du retour de Ses enfants. » Et celui qui demeure auprès du Père sait déjà qu’il possède tout, si bien qu’il n’a aucune raison de jalouser ou d’éprouver de la colère. La parabole éclaire ainsi à la fois la question de la « possession » et celle de la « séparation », offrant une piste décisive pour la résoudre.

Aujourd’hui encore, l’Église doit se renouveler grâce à ce message. En méditant Luc 15, demandons-nous : « N’ai-je pas un comportement de fils prodigue dans certains domaines ? Ou le comportement du frère aîné ? Dans notre communauté, y a-t-il des divisions nées du problème de la possession ? » Surtout, rappelons-nous : « Nous devons revenir au Père, et connaître Son cœur. Là, tous – pécheur repentant ou fidèle jaloux – peuvent se réjouir ensemble. » C’est là la voie proposée par l’une des plus grandes paraboles de Jésus. Et c’est ainsi que nous pouvons faire l’expérience du miracle de l’hospitalité et de l’unité qui caractérise le Royaume de Dieu. Le pasteur David Jang insiste inlassablement sur ce point : « L’Église doit devenir une famille authentique, où l’on accueille le ‘fils prodigue’ tout autant qu’on aide ‘le frère aîné’ à sortir de ses préjugés, à l’image du cœur du Père. » C’est la plus belle conclusion que nous offre la parabole du fils prodigue.

www.davidjang.org

Leave a Comment